Depuis 2022 je visite des centres de recherche entre la France et la Suisse, spécialisés en sciences dites “dures”.
Dans ces espaces cliniques et austères, j’ai été frappé de la présence systématique de formes dont la vocation n’était pas scientifique: des objets, des images, des gestes, jusqu’à des architectures, dont la vocation n’était pas de faire avancer la science, mais de la raconter.
J’ai alors entrepris d’explorer les modalités de ces formes et d’en interroger les enjeux: que nous disent ces choix de la place de l’individualité dans la science? Quel rôle la narration peut-elle jouer face à une perte de repères ?
Toutes nos expériences, nos souvenirs, nos objectifs et nos aspirations, nos raisons, nos justifications, nos excuses et nos prétextes – notre vie entière – sont organisés sous forme narrative.
Ce ne sont ni la logique, ni les mathématiques, ni la physique qui peuvent résoudre les incertitudes auxquelles les humains sont exposés dans un environnement social. Seules les histoires peuvent fournir une boussole fiable dans le monde flou de la coexistence, où les coalitions fluctuent. »
Werner Siefer, Biologiste allemand et spécialiste de la recherche sur le cerveau, dans Der Erzählinstinkt: Warum das (L’instinct Narratif, pourquoi le cerveau pense en histoires), 2015.